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PIFFF 2016, acte 6 : La Nuit Zombie

La nuit blanche organisée à l’occasion de cette 6ème édition du PIFFF est consacrée à ce temps, qui semble si lointain, où les cadavres mangeurs de chair était porteurs d’un double pouvoir, horrifique et allégorique, et non pas prétexte à tout et n’importe quoi.

Zombie, de George Romero (1978) : Il aura fallu pas moins de dix ans à Romeo, après le chef d’œuvre matriciel du genre La Nuit des Morts-Vivants, pour enfoncer le clou. Grand bien lui en a fait de ne pas se précipiter car il a accouché d’un film qui influencera tout autant le cinéma horrifique, créant ainsi « l’Alpha et l’Omega du film de zombies » (complété en 85 par un Jour des Morts-Vivants bien moins novateur). Le montage de Zombie par Dario Argento, également coproducteur et compositeur, impose un rythme et une violence qui révolutionnèrent l’approche entamée par La Nuit… et les nombreux films qui s’en inspirèrent, sans pour autant en perdre la dimension politique. C’est en l’occurrence le cadre de la plupart des scènes d’action, à savoir un centre commercial, qui assura la métaphore entre les cohortes de morts-vivants et une société américaine asservie (chaque vidéo du black friday apparait comme son remake involontaire !). Alors que les maquillages de ces créatures, consistant à peindre en bleu le visages des figurants, pourraient sembler désuets, il n’en est rien : ce qui a finalement le moins bien vieilli vient du mixage son et de quelques musiques composées par Goblins. Tant que les pires névroses consuméristes feront peur, Zombie restera le maitre-étalon de leur représentation. Un film intemporel donc.

Messiah of Evil, de Willard Huyck (1973) : Quand celui qui réalisera en 1986 l’inoubliable Howard the Duck s’attaquait dans son premier film au genre de l’épouvante fantastique, cela ne pouvait aboutir qu’à un résultat artistique singulier. Grâce à un scénario aux inspirations lovecraftiennes assumées et à une direction artistique joyeusement baroque, Messiah of Evil s’assure un capital sympathie qui fit de lui un midnight movie culte aux yeux de certains amateurs. Peut-on d’ailleurs légitimement le rattacher à la thématique des zombies ? Les mangeurs de chair n’y sont clairement pas des cadavres revenus à la vie mais se définiraient davantage comme une secte de cannibales aux intentions assez floues et dont l’appétit les poussera à dévaliser le rayon boucherie du supermarché et manger des rats. Une menace qu’il serait en fin de compte vain d’essayer de comprendre, tant les incohérences du scénario s’évertueront à mêler les fausses pistes. La meilleure chose à faire est donc de mettre son esprit rationnel en stand-by et de partager le cauchemar (ou la folie, c’est une question d’interprétation) de cette jeune héroïne que la mise en scène viendra rendre tangible dans certaines scènes tapageuses. Et pourtant, la tension horrifique ne sera rien face à la tension érotique présente dans la première moitié de cette série B certes foutraque et nébuleuse mais dont certaines idées visuelles deviendront des sources d’inspiration pour certains grands noms du genre.

La Nuit des Morts-Vivants, de Tom Savini (1990) : A la fin des années 80, quand George Romero cherchait quelqu’un à qui confier le remake de son premier film pour satisfaire ses producteurs, il pensa à son truculent maquilleur Tom Savini, à qui il avait d’ailleurs déjà offert un rôle dans Zombie. Sans doute pensait-il que Savini ferait preuve de la même outrance derrière la caméra que dans ses prestations d’acteurs. Bien au contraire, son travail de mise en scène s’est voulu tout en retenue et sans la moindre prise de risque. En plus de cette inexpérience frileuse, les conditions de tournage très difficiles de ce film aboutirent à un résultat bâclé et impersonnel. Paradoxalement, avoir copier/coller le scénario de l’original n’a pas été lui rendre justice tant les dialogues et les situations souffrent d’un certain décalage qui réduisent à peau de chagrin l’allégorie politique que l’on pouvait leur trouver en 1968. Reste les morts-vivants, dont le design est étrangement plus soigné lorsqu’ils sont des créatures seules que lorsqu’ils forment une foule, mais au moins dans ce cas-là ils parviennent à générer une peur de la fatalité inratable que l’on ne retrouve plus aujourd’hui. Un remake qui n’apporte strictement rien au genre et qui, de fait, mérite d’être oublié.

 

Rédacteur